Discontinuité et ouverture à Chypre : la mise en tourisme de la frontière - Université d'Artois Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Territoire en mouvement. Revue de Géographie et d'Aménagement Année : 2015

Discontinuity and Opening up in Cyprus : the Development of Border Tourism

Discontinuité et ouverture à Chypre : la mise en tourisme de la frontière

Jérôme Lageiste
François Moullé

Résumé

In 1974, in a geopolitical context of extreme tension between Greece and Turkey (Mauss-Copeaux, 2011), the sudden establishment (Novosselof, Neisse, 2007) of the Buffer Zone split Cyprus into two parts, confining the Greek Cypriots to the south of the island and the Turkish Cypriots to the north. If the creation of borders establishes on both sides distance in proximity (Arbaret-Schulz, 2008), the Buffer Zone in Cyprus has also introduced hostility in humanity, truly pitting people against each other. Besides the constituent stigma from the implementation of the Buffer Zone such as the ghost tourist resort Varosha (Lageiste, 2011), the distinction coming from material and symbolic membership (Groupe frontière, 2004) has come into force and shape all along the border : ostentatious display of their respective national and cultural attributes - Greek flags versus Turkish flags, steeples versus minarets. This opposition of identities (Di Méo, 2001) continues to assert itself despite repeated conciliatory attempts from the European Union and the United Nations. Nevertheless, from 2003, the opening of breaches in this hitherto hermetic separation - 6 passages are open today - has raised a lot of interest among tourists always eager to experience otherness. Flows (Van Houtum, 2007) have taken shape and led to the development of tourism in the northern part of the island which had remained away from tourist interest since the separation. Some opportunistic agencies have picked up this border originality and used it as a really attractive tourist product : observation of the Buffer Zone in Famagusta, coastal cruising along the abandoned Varosha seafront, opening of shopping centres on both sides of the crossing point opened in the heart of Nicosia, a pedestrian street with western franchises on the Greek side and souks on the Turkish side. This debordering phenomenon (Scott, 2009) has been maintaining, if not strengthening some territorial opposition, while the staging that accompanies it has allowed its capitalizing. Thus, this unique development of tourism has led to a renewed functioning , offering an apparent fluidity through the tourist flows, and also designing a scenography of opposition, conflictuality and resentment.
En 1974, dans un contexte géopolitique d’extrême tension entre la Grèce et la Turquie (Copeaux, Mauss-Copeaux, 2011), l’instauration brutale (Novosselof, Neisse, 2007) de la Buffer Zone a scindé Chypre en deux parties, cantonnant les Chypriotes grecs au sud de l’île et les Chypriotes turcs au nord. Si la mise en place de frontières établit communément de la distance dans la proximité (Arbaret-Schulz, 2008), à Chypre la Buffer Zone a introduit de l’hostilité dans l’humanité, dressant véritablement les populations les unes contre les autres. Outre la présence des stigmates constitutifs de la mise en place de la Buffer Zone telle la station touristique fantomatique de Varosia (Lageiste, 2011), la distinction par l’appartenance matérielle et symbolique (Groupe frontière, 2004) a pris forme et force au long de la frontière. Affichage ostentatoire des attributs nationaux et culturels respectifs - drapeaux grecs contre drapeaux turcs ; clochers contre minarets -. Cette opposition identitaire (Di Méo, 2001) continue de s’affirmer malgré les multiples tentatives conciliatrices de l’Union européenne et des Nations Unies. Toutefois, l’ouverture de brèches à partir de 2003 au sein de cette séparation jusqu’alors hermétique - six points de passage désormais possibles -, a suscité la curiosité, l’intérêt touristique toujours avide d’altérité. Des flux (Van Houtum, 2000) ont pris forme à travers l’île, occasionnant la mise en tourisme de la partie nord de l’île restée hors du fait touristique depuis la séparation. Certains acteurs opportunistes, se sont emparés de cette originalité frontalière pour l’exploiter comme un véritable produit touristique : observation de la Buffer Zone à Famagouste, croisière côtière au long du front de mer abandonné de Varosia, ouverture de commerces de part et d’autre du point de passage ouvert au coeur de Nicosie - rue piétonne avec franchises occidentales côté grec, bazars côté turcs -. Ce phénomène de debordering (Scott, 2009) maintient, sinon renforce l’opposition territoriale, tandis que la mise en scène qui l’accompagne en permet la mise à profit. Ainsi, cette mise en tourisme singulière conduit-elle à un fonctionnement renouvelé, offrant l’apparence d’une fluidité à travers des flux touristiques, tout en scénographiant l’opposition, la conflictualité et le ressentiment.
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hal-03434136 , version 1 (18-11-2021)

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Citer

Jérôme Lageiste, François Moullé. Discontinuité et ouverture à Chypre : la mise en tourisme de la frontière. Territoire en mouvement. Revue de Géographie et d'Aménagement, 2015, ⟨10.4000/tem.2836⟩. ⟨hal-03434136⟩
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